10/2024

Recruter des décideurs métiers issus de la Tech ?

Nous avions évoqué dans notre Étude de Rémunération 2024, ainsi que dans un précédent article sur les CDO issus des big Techs, un phénomène émergeant : le recrutement de Chief Data Officer (et de Chief Digital Officer) issus des big Tech, comme moyen potentiel d’accélération des transformations data/IA. Nous relevions plusieurs écueils à cette tendance : des salaires de l’ordre du double (voire du triple) de ceux des CDO qu’ils ou elles vont remplacer ; le risque de ringardiser son prédécesseur, et surtout tout ou partie de son équipe qui va décrocher et démissionner ; une certaine arrogance et leur faible attention à s’adapter à la culture ce qui fait qu’ils ne sont pas plus suivis par les métiers.

Il serait bon d’écouter plutôt ce que réclament les CDO « actuels » : avoir des interlocuteurs métiers plus sensibles aux sujets Data, IA et GenAI. C’est peut-être eux qu’il faut aller recruter dans la tech, plus encore que les CDO.

Et nous concluions par la nécessiter d’écouter plutôt ce que réclament les CDO « actuels » : avoir des interlocuteurs métiers plus sensibles aux sujets Data et AI/GenAI. C’est peut-être eux qu’il faut aller recruter dans la tech, plus encore que les CDO. Un Directeur du marketing qui viendrait de chez Google, une Directrice de la Supply Chain qui a fait ses classes chez Amazon, un DRH de chez Microsoft … ne serait-ce pas ça l’eldorado du CDO et le secret de sa réussite ?

Mais … approfondissons cette piste de réflexion !

Attention, l’idée de recruter un directeur financier aujourd’hui directeur financier chez Google n’est pas pertinente : il ou elle est tellement habituée à la digitalisation et à l’automatisation des tâches que son immersion dans une entreprise en retard sur ces points génèrera chez elle ou chez lui tant de frustrations et de tâches ingrates à faire faire à son équipe qu’il repartira en courant. D’autant qu’il pourrait certes apporter des bonnes pratiques et réclamer aux équipes data des produits qu’il avait avant chez Google, mais il n’aurait sans doute aucune idée de comment ces produits sont conçus, ce qu’ils impliquent comme moyens et ce qu’il coûtent.

Les profils qu’il faut aller recruter chez Amazon en supply chain, chez Meta ou Criteo en marketing ou chez Google en Finance (à titre d’exemple …), ce sont des talents qui ont un pied dans la data et l’autre dans le métier : des Product Managers qui ont été en charge de développer des produits pour la direction financière ; des Marketing Science Partner qui animent des équipes de data science au service d’annonceurs ou d’agences media ; des CTO … qui deviendront des CIO.

Suivant leur séniorité ces Talents prendront des postes de c-level ou en seront les adjoints ou l’un des membres de leur comex, voire leur coach en transformation digitale.

Revenons en amont : l’idée, audacieuse mais pertinente de recruter des profils issus de la tech pour accélérer ces transformations vient du fait qu’elles sont souvent laborieuses au sein des entreprises de l’économie traditionnelle. En effet, bien que les dirigeants reconnaissent l’importance cruciale des technologies de la donnée et de l’intelligence artificielle (IA), les projets visant leur intégration dans les processus de l’entreprise se heurtent fréquemment à deux obstacles majeurs : la résistance au changement et le manque de culture technologique au sein des équipes dirigeantes.

Le leadership de ces entreprises traditionnelles, qu’il s’agisse des directeurs marketing, financiers ou industriels, est souvent ancré dans une solide expertise sectorielle. Cependant, ils manquent de familiarité avec les innovations technologiques qui redéfinissent leurs secteurs.

Cela engendre une certaine distance entre la vision stratégique de ces décideurs et les opportunités offertes par les avancées numériques. Souvent, la transformation digitale est perçue comme un enjeu exclusivement technique, délégué aux équipes informatiques, ce qui empêche une véritable appropriation au niveau décisionnel.

En faisant appel à des talents issus de la tech pour occuper des postes stratégiques tels que ceux de directeur financier (CFO), directeur des systèmes d’information (CIO), ou encore directeur marketing, les entreprises traditionnelles ont l’opportunité de combler ce fossé. Ces profils, ayant travaillé au sein de grandes entreprises technologiques sur des produits directement liés à la donnée et à l’IA, possèdent une expertise pointue, mais surtout une vision différente. Ils comprennent en profondeur comment exploiter les données pour optimiser la prise de décision, automatiser les processus, et utiliser des modèles prédictifs (et génératifs) afin d’anticiper les évolutions du marché. En s’appropriant ces rôles, ces nouveaux leaders peuvent insuffler une véritable culture technologique, intégrée au cœur de la stratégie d’entreprise.

Prenons l’exemple d’un CFO issu de la tech. Contrairement à ses homologues issus des parcours plus traditionnels, ce dernier ne se contenterait pas de gérer les finances de manière conventionnelle, mais serait à même d’exploiter les technologies de la data et de l’IA pour améliorer les prévisions financières, automatiser des tâches comptables complexes ou identifier des leviers d’optimisation dans les opérations. Ce type de profil, capable de manier à la fois le langage de la finance et celui de la data et de l’IA, deviendrait un précieux atout pour créer un pont entre ces deux mondes souvent hermétiques (que les PO et PM des digital factories tentent de créer, mais souvent avec difficulté malgré leurs compétences pourtant excellentes).

L’apport de ces professionnels ne se limite pas à leur maîtrise technique. Habitués à évoluer dans des environnements où l’innovation est au cœur des préoccupations, ils apportent également une nouvelle manière d’aborder le management. Leur expérience des méthodes agiles, des cycles rapides de développement et de la gestion de projets data/IA leur permet de donner une impulsion nouvelle aux entreprises traditionnelles, trop souvent freinées par des processus rigides et une certaine aversion au risque. Ces leaders introduisent une culture de l’expérimentation des technologies, essentielle à toute transformation digitale réussie.

Plus globalement, ces recrues venant de la tech ne se contenteront pas d’appliquer leur savoir-faire technique, mais contribueront aussi à transformer en profondeur la culture de l’entreprise. Leur arrivée dans des postes de direction enverra un signal fort : la transformation digitale n’est pas uniquement l’affaire des équipes techniques, mais une priorité qui doit être portée par les décideurs métiers. Ce type de leadership technologique favorisera ainsi l’acculturation des autres membres de l’équipe dirigeante, les incitant à s’impliquer davantage dans les enjeux technologiques et à les intégrer à leurs propres responsabilités.

Cette approche contribue également à surmonter l’une des principales barrières à la transformation digitale : la résistance au changement. L’introduction de technologies telles que l’IA et la data est souvent perçue avec méfiance par les cadres habitués à des méthodes plus traditionnelles. Les nouveaux leaders technologiques, ayant déjà navigué à travers ces défis dans des entreprises avant-gardistes, seront capables de démontrer comment ces technologies peuvent non seulement coexister avec les processus humains, mais aussi les amplifier, en termes d’efficacité et de performance. Ils auront la capacité de structurer les équipes technologiques, d’encadrer les projets data, et de redéfinir les indicateurs de performance en intégrant les critères liés à l’usage de l’IA et de la data.

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